CSRD et Taxe carbone : l’Europe structure le monde décarboné de demain
Par Redaction | Le 02/01/2023 | Actu | Environnement | Green | News
La course mondiale à la décarbonation de l’économie nous concerne tous, et pour structurer le marché, la normalisation et la fiscalité sont deux outils puissants. L’Europe vient coup sur coup de finaliser deux décisions attendues : la Corporate Sustainability Reporting Directive (CSRD) et la Taxe Carbone aux frontières de l’Europe. De quoi s’agit-il ? En quoi cela peut-il concerner le lecteur d’Oovango ?
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Il était temps d’établir de nouvelles règles de jeu
Pour faire face au changement climatique, à la préservation de la biodiversité, au respect des limites planétaires, on le sait, chacun a sa part. Mais dans le monde de l’entreprise soumis aux règles du marché, comment faire des efforts si son concurrent n’en fait pas ? Comment prendre des décisions stratégiques en faveur du vivant ? Ou réaliser des investissements lourds favorables au climat mais qui impactent la rentabilité, si on doit en plus perdre des parts de marché, et mettre en péril l’entreprise, parce que certains concurrents ne jouent ni avec les mêmes règles, ni avec les mêmes objectifs ? Et à titre individuel, peut-on franchement demander au consommateur, par exemple l’automobiliste,
de casser sa tirelire pour rétablir les choses et financer à ses frais la vertu climatique ? Ou encore comment résister durablement aux tarifs attractifs des panneaux solaires chinois produits avec une électricité très carbonée ? À l’évidence, il faut de nouvelles règles de jeu.
L’Europe se penche sur ce problème depuis des années, pour donner aux entreprises un cadre juste, équitable et incitatif. Les Quotas carbone par exemple ont été prévus par le protocole de Kyoto (1997). Il s’agissait pour les gros pollueurs en CO2 (par exemple les producteurs d’acier) d’acheter des droits de polluer, les Quotas, eux même régulés par le marché ETS (Emission Trading System). Problème : certains concurrents hors d’Europe n’étaient pas soumis aux mêmes règles. Pour aplanir cette inéquité, des quotas gratuits ont été distribués. Ce qui in fine a rendu le système largement inopérant, avec un marché des quotas sans grand intérêt pour les acteurs. Dans le monde et sur une autre dimension, l’International Sustainability Standard Board (ISSB) travaille aussi pour ajuster le cadre de la concurrence internationale avec un reporting extra-financier commun.
L’Europe est passée à l’action avec la directive CSRD et la Taxe Carbone
Coup sur coup, sur les 2 derniers mois de 2022, l’Europe a lancé deux mesures majeures. La première mesure vise à donner aux entreprises un cadre de reporting extra-financier contraignant et commun (la directive CSRD, pour Corporate Sustainability Reporting Directive), pour tout ce qui a trait au développement durable et en particulier l’empreinte carbone. La seconde vise à établir une Taxe Carbone aux frontières de l’Europe. De quoi s’agit-il ? En en quoi cela nous concerne-t-il ?
CSRD : normaliser la transparence extra-financière
Commençons par la CSRD. Cette directive vient d’être publiée au Journal Officiel de la République Française en décembre 2022. Elle sera très prochainement déclinée dans notre outil législatif. Elle concerne les entreprises de plus de 500 salariés dès 2024. Cela sera 2025 ou 2026 pour celles comprises entre 10 et 500 salariés. Dans le non-coté, seules les entreprises de moins de 250 salariés y échapperont. Cela à condition qu’elles ne fassent pas plus de 40 M€ de CA et 20 M€ de total de bila.
Cela évite d’exonérer les sociétés d’investissement avec beaucoup d’actifs et peu d’effectifs. Un point majeur de cette directive – celle-ci ne se limite pas au sujet des émission de GES mais en fait un axe décisif – : l’empreinte carbone se mesure non pas seulement selon les périmètres dits scope 1 (émissions directes) et scope 2 (émissions indirectes) mais aussi scope 3 (émissions amont et aval de la chaîne de valeur).
Valoriser l’effort plus que la performance initiale, devient la règle commune
La prise en compte du scope 3 est une évidence, mais cela n’a pas toujours été le cas. Et il reste du travail avant que ne disparaissent les discours d’entreprises soit-disant « neutres en carbone » ou publicités mensongères par exemple de véhicules « 0 émission ». Le scope 3 nous rappelle que nous sommes tous « des nains sur des épaules de géants » (Bernard de Chartres, XIIè siècle), interdépendants et solidaires, et une métrique pour mesurer cette dépendance est incontournable.
L’arrivée de la CSRD modèle aussi un état d’esprit. En mesurant l’empreinte carbone, on ne mesure pas un indice de vertu mais une dépendance par rapport à une énergie non décarbonée, et surtout un repère pour définir une trajectoire afin de contribuer au fameux « Net Zero » de 2050. On le sait, cette trajectoire revient à diminuer son empreinte de 5% par an jusqu’en 2050. Désormais une métrique publiée viendra mesurer ces efforts.
Une compréhension commune des enjeux grâce à la CSRD
Enfin, cette CSRD va accélérer la mise en place d’une compréhension commune des enjeux, en normalisant des méthodes de calcul sur le scope 3 qui évitent des débats stériles. Récemment par exemple, GreenPeace avait accusé TotalEnergies d’avoir minimisé ses émissions. En fait, GreenPeace avait simplement impacté à 100% les activités de trading de TotalEnergies. Cela n’a pas grand sens, si vous achetez un baril à 100 et le revendez à 100 sans jamais en avoir vu la couleur, difficile d’imputer l’empreinte de ce baril à la compagnie. En imputant un prorata de la valeur ajoutée de l’activité de trading au volume traité, la démarche est plus juste, comme l’observe la société de conseil Carbone 4 dans son avis. Avec près de 400 Millions de tCO2e, l’empreinte carbone de TotalEnergies part de loin, mais
en publiant chaque année ses progrès, on pourra alors juger de la sincérité de la stratégie TotalEnergies dans le temps. Valoriser l’effort plus que la performance initiale devient la règle commune, portée par la CSRD.
Une Taxe Carbone pour protéger les investissements dans la décarbonation
La mise en place de la Taxe Carbone aux frontières de l’Europe décidée en décembre 2022 est un mécanisme qui va révolutionner les échanges dans certaines catégories bien définies, qui sont responsables de 40% des émission de GES dans le monde. Il s’agit de l’acier, l’aluminium, le ciment, l’engrais, l’électricité, l’hydrogène, liste à laquelle s’ajoutent le chauffage, les voitures, le secteur maritime et l’aviation. Le principe est simple, la mise en œuvre sans doute un peu ardue mais l’objectif est clair : donner un outil financier aux entreprises pour qu’elles valorisent leurs efforts de décarbonation, sans les pénaliser face à la concurrence extra-européenne. Il s’agit ainsi de supprimer progressivement les Quotas carbone gratuits en Europe, et d’affecter les importations de montants de taxe équivalents (la Taxe Carbone), ajustée sur le différentiel de Quotas éventuellement mis en œuvre dans le pays exportateur. Ainsi, les industriels européens ne sont pas tentés de délocaliser leur production pour échapper aux Quotas. Il ne seront pas non plus désavantagés par rapport à leurs concurrents. Et le principe du différentiel permet de ne pas être accusés de mettre en place une barrière douanière incompatible avec les règles de l’Organisation Mondiale du Commerce. Enfin, les exportations vers des pays sans taxation bénéficieront d’un dispositif spécifique.
Les revenus générés par ces taxes viendront abonder le Fonds social pour le climat en soutien des ménages et le Fonds d’innovation en accompagnement des entreprises. Le rythme de la mise en place (fin des quotas gratuits d’ici à 2034) témoigne de l’ampleur des ajustements à opérer par les industriels et les acteurs du secteur. Rien n’est parfait, on aurait souhaité une mise en œuvre plus rapide, mais quel chemin parcouru !
Un cadre collectif pour sécuriser les initiatives individuelles
En quoi tout cela nous concerne-t-il ? La marche pour la décarbonation de l’économie vers la neutralité de 2050 va être, ne nous leurrons pas, très ardue. On ne quitte pas une dépendance à 80% d’énergies fossiles en quelques claquements de doigts. Et on ne peut pas mener cet effort seul, au risque d’un découragement total. Rappelons que si, par une vue de l’esprit, on met toute la France sur « Off » avec un retour total à la terre et à la bougie, et si au passage, pour se faire plaisir, on arrêtait 100% du trafic aérien mondial (y compris au passage en clouant au sol, l’intégralité des jets privés, boucs émissaires microscopiques mais utiles), le problème de l’excès d’émissions de GES mondial resterait entier à près de 95%. Autant dire que seul, on ne peut rien.
À l’évidence, nous sommes à un moment de l’histoire où la solidarité mondiale doit être le moteur face au défi climatique. En mettant en place la Taxe Carbone aux frontières, et la CSRD, l’Europe apporte sa contribution sur le marché des 27, incontournable et majeur à l’échelle du monde : créer un cadre ouvert, transparent et juste pour avancer ensemble. Une des clés de voûte de la cathédrale – celle d’un avenir pour l’humanité – vient d’être posée, cela nous concerne tous. À nous de continuer à tailler et poser des pierres.
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